Une dernière louche !
Et un grand merci au dessinateur Yannick Dantec, aux rédacteurs Annabelle Brunet, Claire Corlier, Yannick Dantec, Michaël Dusautoy, Damien Saugeon et Jean-Pascal Videau.
Nom légendaire : Mademoiselle Rôti de Chanel
Identité réelle : Victoire De Labil
Sexe : Féminin
Taille : 1,75 m
Poids : 65 kg
Cheveux : noirs
Yeux : noirs
Peau : Teint n° 9456, éclat foudroyant
Base : France
Première apparition : janvier 1922 pour le réveillon.
Costume : hippie luxe et catholique, tailleur Chanel aux motifs de boubou africain.
Type de cuisine favorite : familiale
Catégorie : Supère Vilaine
Ennemis : les abats et le cochon
Expression fétiche : « Bon Micheline, il s’agit de pas s’endormir sur le rôti ma bonne ! »
Humeur, particularité et nature des pouvoirs : Mademoiselle Rôti de Chanel est d’un tempérament bileux et suspicieux qui fait d’elle la bête noire des dévotes et des enfants de chœur de sa paroisse. Elle est armée d’un super thermostat dissimulé dans un serre-tête. Il lui garantit l’exactitude des températures idéales de cuisson. Ses poignets renferment des glandes à ficelles à rôti. La nature profonde de ses pouvoirs s’exprime essentiellement les dimanches et les jours de fêtes catholiques. Contrairement aux nombreux objectifs de destructions planétaire affichés par les ligues officielles des Super Vilains, Rôti de Chanel montre sa différence et revendique d’imposer à l’univers la consommation régulière de viandes rouges rôties à cœur.
Origine des pouvoirs / Histoire :
Cinq mai 1921 : toute la France frémissait de l’excitation provoquée par le lancement fracassant de la fragrance Chanel N°5.
Ce parfum qui allait devenir le symbole éternel du luxe, du raffinement et de la féminité devait sortir le jour dit chez tous les grands parfumeurs français. Le soir précédent ce lancement, de nombreux camions parcouraient la France à toute vitesse pour livrer le précieux flacon. C’est dans ces circonstances qu’un terrible drame allait se nouer en Basse Normandie, aux abords de La Hague. À l’heure des vêpres, Victoire, une petite fille de 9 ans bien élevée et d’une grande dignité, se trouvait dans l’église gospel Sainte-Croix de la Hague quand l’un des camions Chanel entra en collision avec un Berliet banalisé. Cet accident aurait pu être anodin si le contenu du deuxième véhicule avait été inoffensif. En l’occurrence, le Berliet venait de remplir son camion de produits hautement radioactifs d’une usine de retraitement de déchets nucléaires.
L’impact entre les deux camions fut si violent qu’il projeta les chargements en plein cœur de l’édifice. Les fidèles purent toutefois s’échapper du bâtiment à l’exception de Victoire. La jeune fille fut recouverte en quelques secondes d’une mixture faite d’eau bénite devenue radioactive et de N°5.
De plus, Victoire se retrouva écrasée par l’éboulement d’une fresque représentant la scène de Suzanne au bain. La beauté de cette scène et le courage de Suzanne lui donnèrent l’énergie nécessaire pour s’extraire des décombres. Son petit chignon était tombé sur ses yeux et sa robe toute neuve étaient en lambeaux. Mais elle soulevait les débris avec une force inimaginable.
En la voyant sortir des vestiges de l’église, les badauds crièrent au miracle. Victoire De Labil se recoiffa, redressa la tête de son port royal et dans un demi sourire réclama de quoi se restaurer. Face au banquet que le village lui offrit, elle n’accorda étrangement ses grâces qu’aux morceaux de viande rouge fumants et caramélisés. L’accident semblait avoir révélé et amplifié en elle la parfaite ménagère catholique que sa mère et sa grand-mère cherchait à éduquer. Comme nous le savons tous, un rôti rose et tendre servi le dimanche est la marque d’une bonne maîtresse de maison et d’une femme digne et respectable.
Quelques mois après, son goût pour les pièces de bœuf et les frites devint incontrôlable. Elle ne cessait de réclamer des viandes rôties à la broche ou au four. Cette passion devint si dévorante que ses parents ne pouvaient plus la maîtriser. Chaque dimanche, elle enfilait son petit tablier vichy rouge, alignait méthodiquement ses boîtes Tupperware par ordre de grandeur, triait précieusement ses pommes de terre, massait consciencieusement la viande pour la détendre avant d’affûter soigneusement son cher couteau électrique. Sa mère elle-même était bannie des fourneaux. Seule Victoire, qui exigeait désormais que même ses parents l’appellent « Mademoiselle », savait détecter l’instant précis où la cuisson de la viande était parfaite. Sa toute puissance culinaire faisait régner un climat de terreur dans la cuisine. La bile qui l’animait bouillonnait en elle à la façon d’un bain d’huile de friture.
Malgré ses bonnes manières, l’arrivée des dimanches la rendait souvent très irritable. Elle manqua égorger un boucher parce que sa façon de couper le rôti manquait de grâce et de respect.
Après cet incident, ses parents décidèrent de la confier à un établissement spécialisé. Elle reçut une formation de choc au sein des équipes des rôtisseuses de Cherbourg, avant de partir en camp de survie en Afrique. Ce mystérieux continent, aux rites ancestraux, aux peuples pieux et particulièrement savants des techniques de chasse, la fascina. Sa rencontre avec la faune locale fut la cause de la disparition de bien des espèces. Les derniers mammouths beiges du Burkina-Faso, le buffle angora aux longues dents ainsi que les terribles phacojozes frisés, descendants directs des tyrannosaures, ont été exterminés jusqu’au dernier. En contrepartie, elle introduisit l’usage du rince-doigt. C’est au sein d’un groupe de chasseurs de la tribu des ouièrepoolpoulos, de l’ancienne colonie de la province de Sainte Thérèse, qu’elle apprit de nouvelles techniques pour cuire la viande en toutes circonstances (tout en revendiquant élégance et dignité). Elle apprit à cette occasion l’usage de la sagaie. Elle bondissait d’arbre en arbre en projetant ses solides ficelles à rôti. Une fois camouflée derrière des branchages, elle lançait la sagaie d’une main ferme et ornée d’ongles parfaitement peints.
De retour en France, et riche de ces enseignements, elle prit la tête du célèbre groupe d’activistes anti-végétarien(ne)s le clan des Viandes saignantes. C’est à cette occasion qu’elle exigea qu’on l’appelât désormais Mademoiselle Rôti de Chanel.